Raijin et Fujin : les dieux japonais de la foudre et du vent

Raijin et Fujin : les dieux japonais de la foudre et du vent

Raijin et Fujin : les dieux japonais de la foudre et du vent 1024 768 Michaël da Silva Paternoster

Raijin et Fujin font partie des divinités japonaises les plus craintes et respectées. Ces deux dieux sont les maitres de la foudre et des tempêtes, de phénomènes météorologiques dévastateurs dans un pays régulièrement touché par des typhons.

Dans cet article, je commencerai par vous présenter Raijin, le dieu de la foudre, pour ensuite me concentrer sur son frère, Fujin, le maître des vents. Enfin, je terminerai en vous expliquant en quoi ces deux divinités ont, encore aujourd’hui, un rôle majeur dans la culture japonaise.

Raijin : le dieu japonais de la foudre

Raijin, aussi connu sous les noms de Kaminari-sama et Raiden-sama, est le dieu japonais de la foudre, de la lumière et des tempêtes. Il s’agit d’une des divinités les plus craintes de la culture japonaise. Au Japon, les adultes disent souvent aux enfants de se couvrir le nombril lorsqu’une tempête approche, car Raijin pourrait le manger !

Il est souvent représenté avec une expression du visage qui laisse dégager toute son agressivité. Sa peau rouge, comme celle d’un Oni, le fait ressembler à un démon. Comme le dieu nordique Thor, il est armé de marteaux avec lesquels il frappe sur des tambours pour créer le son des éclairs.

Statue en bois de Raijin se trouvant dans la mission Shingon de Hawaii.
Statue en bois de Raijin se trouvant dans la mission Shingon de Hawaii. Photo par D100763 sous licence Creative Commons.

La plupart du temps, il est représenté avec seulement trois doigts à chaque main. Chacun des doigts représentant le passé, le présent et le futur. Il a souvent la peau rouge, ce qui fait ressortir son caractère démoniaque.

Lors des saisons sèches, les agriculteurs les plus croyants prient Raijin pour qu’il apporte la pluie et le tonnerre. En plus des pluies, le tonnerre à la réputation d’aider la fertilisation du riz au Japon. La coutume dit qu’un champ qui a été frappé par un éclair offrira une bonne récolte.

Les origines de Raijin

Comme beaucoup d’autres dieux de la mythologie japonaise, Raijin est le fils des dieux Izanagi et Izanami. Il est ainsi le frère d’autres divinités japonaises importantes, dont Amaterasu et Susanoo. C’est d’ailleurs la naissance de son frère ainé, Kagutsuchi, le dieu du feu, qui provoquera la mort de sa mère.

Raijin est né du cadavre calciné d’Izanami, lorsqu’elle se trouvait dans le monde des morts, juste après la création du Japon. Plus tard, sa mère lui aurait demandé de ramener Izanagi, son père, dans le monde des morts après qu’il l’ait abandonné en voyant son cadavre.

Une autre légende raconte qu’un homme nommé Sugaru aurait capturé Raijin sur la demande de l’Empereur afin de stopper les tempêtes. Ce fait héroïque aurait été accompli avec l’aide de la divinité Kannon.

Fujin : le dieu japonais du vent

Fujin, aussi nommé Futen, est le dieu japonais du vent. Il est souvent représenté avec un sac contenant les bourrasques qu’il distribue. Son caractère bestial est retranscrit par sa tenue, qui est constituée d’une peau de léopard, et de son air ébouriffé, causé par les rafales qu’il laisse échapper de sa besace.

Statue de Fujin dans le temple Taiyu-in Reibyo, à Nikko.
Statue de Fujin dans le temple Taiyu-in Reibyo, à Nikko. Photo par Fg2 dans le domaine public.

A la différence de Raijin, il a quatre doigts à chaque main. Chacun d’entre eux représente un point cardinal.

Un dieu protecteur du Japon

Ce dieu est très important pour les Japonais qui le craignent notamment pour les typhons qu’il produit. Mais, Fujin n’est pas qu’un dieu menaçant, puisqu’il est également vu comme un sauveur par le peuple japonais.

En 1274 et 1281, il aurait protégé le Japon des invasions mongoles en intervenant directement dans le conflit. En effet, la flotte du plus grand des empires de l’Histoire a été frappée à deux reprises par des tempêtes en mer, alors qu’elle tentait de mettre un pied sur l’archipel japonais afin de le soumettre.

Cette intervention divine est appelée « Kamikaze », le vent divin, par les locaux. Vous avez bien lu. C’est cet événement qui a donné le nom aux attaques suicides commises par les forces spéciales japonaises durant la seconde guerre mondiale. Ce terme est resté dans le language courant pour décrire des sacrifices similaires.

Une divinité qui a voyagé !

Malgré le fait que son image soit régulièrement utilisée par les mouvements nationalistes japonais, le dieu Fujin trouverait son origine dans des régions bien éloignées du Japon. Cette divinité serait apparue dans les villes d’Asie centrale qui constituaient des étapes importantes de la route de la soie.

Gravure d'une statue athénienne du dieu Boréas.
Gravure d’une statue athénienne du dieu Boréas réalisée au XVIIIe siècle par les britanniques James Stuart et Nicholas Revett.

Il s’agirait en fait d’une réinterprétation du dieu grec Boréas, divinité du vent du Nord. La croyance en ce dieu aurait été importée au IVe siècle avant notre ère par les troupes macédoniennes d’Alexandre le Grand, en même temps que de nombreuses autres traditions grecques. En effet, cette période d’hégémonie macédonienne a permis à la culture grecque de se diffuser en Orient. Ces influences occidentales ont complètement bouleversé l’art bouddhique, au point où de nombreuses statues du Bouddha reprennent les traits d’Apollon.

Boréas ne se serait pas arrêté dans les plaines arides d’Asie Centrale, et aurait continué son chemin vers l’Est, sous le nom Wardo, grâce à son intégration dans l’art gréco-bouddhiste. Après être passé par la Chine puis la Corée, Wardo serait arrivé au Japon à peu près en même temps que le bouddhisme, vers le VIe siècle.

Raijin et Fujin dans la culture japonaise

Malgré leur rivalité pour le contrôle du ciel, Raijin et Fujin sont souvent représentées ensembles dans les arts traditionnels japonais. Cela a donné de nombreux chefs-d’oeuvre que vous pouvez encore observer lors d’un voyage au Japon.

Les gardiens du temple Senso-ji, à Tokyo

La porte Hozomon, à Senso-ji, Tokyo
La porte Hozomon, à Senso-ji, Tokyo. Photo par Michaël da Silva Paternoster pour Nipponrama.

Même s’ils sont craints pour leur caractère colérique, les deux dieux sont souvent vu comme des protecteurs. C’est pourquoi ils sont les gardiens de nombreux lieux de culte au Japon. L’exemple le plus connu est le temple Senso-ji dans le quartier d’Asakusa, à Tokyo. En effet, leurs deux statues gigantesques surveillent le plus vieux temple de la capitale japonaise depuis sa porte d’entrée, le célèbre Kaminarimon.

Fujin-Raijin-zu par Tawaraya Sotatsu

Copie de Fujin-Raijin-zu réalisée par Kogata Ogata. Oeuvre exposée au Musée National de Tokyo.

L’une des représentations les plus connues des deux dieux des cieux sont des panneaux dorés réalisés par l’artiste Tawaraya Sotatsu. Cette oeuvre fabuleuse datant du XVIIe siècle est aujourd’hui exposée au Musée National de Kyoto avec d’autres objets de la même période.

Ces panneaux dorés sont connus pour l’arrangement de la scène qu’ils représentent. En effet, Fujin et Raijin se trouvent aux deux extrémités de l’oeuvre, ce qui a pour effet de retranscrire la tension entre ces deux frères. L’espace qui les sépare fait échos à leur rivalité.

Une copie réalisée par Kosuke Ogata est exposée au Musée National de Tokyo. Vous savez donc où vous rendre si vous n’avez pas la chance de visiter Kyoto pendant votre séjour au Japon.

Dans la culture populaire moderne

Les oeuvres populaires du XXe et XXIe siècles qui s’inspirent de Raijin et Fujin se comptent par centaines. Il est impossible de toutes les mentionner dans cet article. Je vais donc me concentrer sur deux exemples très appréciés en Occident, afin de vous montrer l’importance qu’ont ces deux dieux sur la culture populaire japonaise moderne.

Parmi les centaines de Pokémons, il existe deux monstres qui sont inspirés de Fujin et Raijin : Boréas et Fulguris sont des Pokémons de type vol et électrique. Ils forment un trio de monstres légendaires avec Déméteros.

Le manga Naruto est un autre bon exemple. Il reprend d’une certaine façon ce mythe de l’affrontement fraternel entre les dieux du vent et de la foudre. Même si les deux principaux protagonistes de ce shonen ne sont pas frères, ils sont liés entre eux et passent le plus clair de leur temps à s’affronter. Cette inspiration devient évidente lorsque l’on réalise que Naruto maîtrise le vent et Sasuke manipule la foudre.

En bref, Fujin et Raijin sont des divinités à part. Ces deux frères représentent plus que les tumultes climatiques aux yeux des Japonais. Même s’ils n’ont pas un rôle aussi important qu’Amaterasu, déesse du Soleil dans le shintoïsme, ils sont des figures respectées au point où ils inspirent de nombreuses oeuvres de fiction.

Michaël da Silva Paternoster

Je suis un français vivant à Tokyo, où je travaille en tant que manager et consultant en web marketing depuis plusieurs années. J’ai décidé de partager mes conseils de voyages et diverses astuces qui vous aideront à vous installer au Japon sur ce blog.

All stories by : Michaël da Silva Paternoster